Lundi 11 mai 2009{par Autres contributeurs}
La Vague | par Rougenoirblanc
Autocratie : « qui tire son pouvoir (cratie) de lui-même (auto) »
L’Allemagne pourra-t-elle voir apparaitre ou subir un jour une nouvelle dictature ?
Voici une des première questions que pose M. Rainer Wenger Ă ses Ă©tudiants, participant Ă un workshop sur l’autocratie. Dans le but de leur enseigner certaines valeurs, ce professeur (ancien anarchiste) au sein d’un lycĂ©e allemand soumet ses Ă©tudiants Ă une expĂ©rience murement rĂ©flĂ©chie.
Tout d’abord, il leur demande de rĂ©flĂ©chir sur le principe d’autocratie, sous sa forme dictatoriale. Les termes « 3ème Reich », « Fuhrer » surgissent. Un dĂ©bat est lancĂ©. L’idĂ©e de nationalisme extrĂŞme brĂ»le les lèvres des Ă©tudiants. Le refus d’acceptation du passĂ© allemand soumet au malaise. Et pourtant…
Étape par Ă©tape, il leur impose des règles, faisant basculer progressivement une classe d’adolescents en un mouvement s’Ă©tendant peu Ă peu dans la ville. Le nom de « La vague » est votĂ©. Peu Ă peu, la solidaritĂ© se transforme en rĂ©elle communautĂ©. Des liens improbables se tissent. Les Ă©tudiants ne s’en rendent pas compte. Ils sont engluĂ©s dans la marche du mouvement, de l’expĂ©rience. Certains nĂ©anmoins s’y refusent, et sont immĂ©diatement traitĂ©s en paria. Situation et sentiment rapidement renforcĂ©s par l’adoption d’un uniforme : jeans et chemise blanche. Une forme de salut apparait : mime d’une vague avec le bras droit, se terminant en une posture très militaire. Certains Ă©tudiants n’y voient qu’un sujet d’Ă©tude. D’autres, plus faibles d’esprit y adhèrent, ne possĂ©dant pas de repères propres solides. D’autres enfin, seuls dans la vie, s’y attachent, y entrevoyant la possibilitĂ© d’une nouvelle « famille ».
La solidaritĂ© entre les partisans de « La Vague » se renforce. Cela s’accompagne du rejet d’autrui, ceux qui refusent de s’y soumettre, comme les parias du groupe originel.
Le mouvement gagne la ville, « l’emblème » est graffĂ© et stickĂ© partout. Certains, voulant se dĂ©marquer, risquent leur vie pour prouver leur valeur avec fiertĂ©.
Rainer, le professeur, est prĂ©venu par diffĂ©rentes personnes (sa femme, une Ă©tudiante…) que tout cela va trop loin. Mais dans sa logique pĂ©dagogique, il continue. IntĂ©rĂŞt scolaire, curiositĂ© humaine malsaine, ou perte de contrĂ´le ? Jusqu’oĂą iront ses Ă©tudiants ?
Les quelques « parias du groupe, conscients du danger apportĂ© par cette expĂ©rience, tentent de prĂ©venir la conscience publique. Mais les partisans de La Vague sont enfermĂ©s dans leur nouvelle idĂ©ologie, et les contraignent au silence.
C’est l’idĂ©e de conformisme qui est mise en avant. La mise en place d’un système de pensĂ©e unique, appuyĂ© par un uniforme, par un signe de reconnaissance, par un comportement de troupe. Les diffĂ©rences s’effacent parmi les membres du mouvement. C’est d’ailleurs le seul point positif, mais Ă quel prix ? Le professeur perd peu Ă peu le contrĂ´le de son expĂ©rience, qui s’achève bien tragiquement.
MalgrĂ© tout, La Vague est aux premiers abords un peu trop « simpliste ». Il n’y a pas vraiment de rĂ©el point d’accroche. Il se regarde de bout en bout, sans rĂ©elle saveur, passivement. Tout est trop convenu. On s’Ă©tonne de la facilitĂ© avec laquelle les Ă©tudiants acceptent et s’attachent aux idĂ©es qui leurs sont imposĂ©es. Il y a certes cette notion d’acceptation par le groupe, mais ce n’est plus juste un jeu pour les diffĂ©rents adolescents. On retrouve d’ailleurs diffĂ©rents stĂ©rĂ©otypes parmi eux (la hippie, le sportif, le solitaire, le marginal…), comme pour montrer que tous peuvent ĂŞtre atteints par une montĂ©e du fascisme sans s’en rendre compte.
Au final, on se retrouve devant un film montrant comment cela a lieu, et non pas pourquoi. Ce n’est qu’en faisant bien attention durant le film, aux relations entre les personnages (surtout pour M.Reiner), et en rĂ©flĂ©chissant ultĂ©rieurement que l’on peut trouver un contenu plus profond. Certainement que le roman de Todd Strasser s’affranchit de la limite de durĂ©e du cinĂ©ma et approfondit un peu la chose. Sachant que l’histoire est inspirĂ©e d’un fait rĂ©el survenu en Californie Ă la fin des annĂ©es 60, il serait dommage de ne pas en tirer un enseignement destinĂ© Ă ne pas rĂ©pĂ©ter les erreurs du passĂ©.
Je vous invite nĂ©anmoins Ă voir ce film (la langue germanique ne m’aura en rien rĂ©butĂ©, bien au contraire) afin de dĂ©couvrir jusqu’oĂą peut aller une telle expĂ©rience.
Mais dĂ©pĂŞchez vous, il est sorti depuis 2 mois, mais est encore Ă l’affiche dans quelques dizaines de salles françaises.
La Vague (Die Welle) 2009
Réalisateur : Dennis Gansel
Acteurs :
JĂĽrgen Vogel … Rainer Wenger
Frederick Lau … Tim Stoltefuss
Max Riemelt … Marco
Jennifer Ulrich … Karo
Christiane Paul … Anke Wenger
Samedi 23 mai 2009 à 22 h 58 min Franois à répondu:
J’ai beaucoup aimĂ© ce film. MĂŞme si le final reste prĂ©visible et sans surprise et qu’il manque selon moi un rĂ©el travail de profondeur dans la globalitĂ©, ce "petit film" sans prĂ©tentions ne soulève pas moins autant de questions et de remises en question.